Revue de presse octobre 2024
Maroc/Espagne
- El País, « Marruecos se declara dispuesto a recibir de vuelta a los menores no acompañados, pero advierte de las dificultades legales », le 8 octobre 2024
- El Diario, « Clavijo sugiere ahora que la ONU acoja en Marruecos a los menores migrantes bajo tutela de Canarias », le 25 octobre 2024
Le chef du gouvernement aux îles Canaries, Fernando Clavijo, s’est rendu à Rabat le 8 octobre afin de renforcer la coopération entre le gouvernement régional de l’archipel et le gouvernement marocain en matière de gestion migratoire. Bien que la collaboration entre l’Espagne et le Maroc pour limiter l’arrivée de personnes exilées en Europe ne soit pas nouvelle, cette coopération inclut cette fois un élément inédit : la prise en charge délocalisée par l’OIM au Maroc des mineur·e·s isolé·e·s étranger·è·s arrivé·e·s aux Canaries, qui resteraient toujours sous la tutelle de la région. Selon le cadre juridique espagnol, lorsqu’une personne exilée arrivée par des postes frontières non habilités est identifiée comme mineure, ce n’est pas le ministère de la Migration qui assure sa prise en charge, mais bien la région où elle est arrivée. Les mineur·e·s isolé·e·s étranger·e·s arrivant aux îles Canaries relèvent donc de la tutelle de cette région. Cette mesure s’inspire du « plan Meloni », visant à transférer la prise en charge des personnes exilées vers des pays dits tiers, une initiative dont plusieurs membres du parti de Clavijo ont fait l’éloge. Clavijo a présenté cette proposition en prétendant qu’elle donnerait l’opportunité aux mineur·e·s « de retourner chez eux » alors qu’ils ont précisément souvent fui leurs pays en quête de meilleures perspectives.
Une coopération entre les îles Canaries et le Maroc visant à renvoyer les mineur·e·s isolé·e·s étranger·è·s arrivé·e·s sur l’archipel contreviendrait à la Convention internationale des droits de l’enfant, qui interdit explicitement les renvois de mineur·e·s. Cette coopération bilatérale s’inscrirait dans une stratégie d’externalisation accrue des politiques migratoires espagnoles au Maroc, pays qui, depuis plus de 20 ans, exerce un rôle de garde-frontières pour l’Espagne [1]. Le choix de Clavijo de faire appel à l’OIM pour la prise en charge de ces enfants, plutôt qu’à l’UNICEF, est problématique : l’OIM, dont la mission est de gérer les flux migratoires, agit souvent comme un maillon important dans les dispositifs de dissuasion et d’entrave de l’émigration [2].
Sénégal
- Le Monde, « Le Sénégal reçoit une aide européenne de 30 millions d’euros pour endiguer l’immigration clandestine », le 17 octobre 2024
L’Union européenne a annoncé, le mercredi 16 octobre, l’octroi d’une aide de 30 millions d’euros au Sénégal pour « lutter contre l’immigration clandestine en provenance de ce pays ». Selon la Commissaire européenne aux partenariats internationaux, ces fonds visent à « secourir les migrants en danger, lutter contre la traite des êtres humains et sensibiliser la population aux risques de la migration clandestine ». Cette nouvelle aide vient s’ajouter à un projet de 5,75 millions d’euros, également financé par l’UE, destiné à renforcer les capacités des forces de sécurité sénégalaises pour bloquer les mouvements migratoires vers l’Europe.
Cette aide s’inscrit dans la continuité de l’externalisation des politiques migratoires européennes. Les déclarations de la Commissaire européenne, qui affirme que cette aide « contribue à sauver des vies sénégalaises », sont fallacieuses. La « sensibilisation » aux dangers de la migration montre l’instrumentalisation faite par les institutions européennes de la souffrance des personnes migrantes pour justifier des politiques de dissuasion. Les personnes en migration sont souvent conscientes des dangers auxquels elles s’exposent en prenant des routes illégalisées, mais elles le font quoi qu’il en coûte faute d’alternatives viables et d’accès à un visa [3]. Ces personnes ne seraient pas en danger si les politiques migratoires européennes n’entravaient pas la mobilité des exilé·e·s.
Syrie
- Politico, « The EU wants to deport migrants. It needs the help of Syria’s Assad. », le 16 octobre 2024
Une dizaine d’États membres de l’Union européenne, dont certains sont gouvernés par l’extrême droite, exerce une pression coordonnée sur l’Union pour normaliser les relations avec la Syrie, pays avec lequel l’UE a rompu ses liens diplomatiques depuis le début de la guerre civile en 2011. Cette initiative vise à faciliter les renvois forcés de personnes Syriennes vers ce pays. La Première ministre italienne, à l’origine de cette initiative, a insisté sur le fait qu’il serait « nécessaire de travailler à la création des conditions permettant aux réfugiés syriens de retourner chez eux de manière volontaire, sûre et durable ».
Il est impossible de concevoir de manière « sûre » un retour en Syrie, pays en guerre depuis plus d’une décennie. En Syrie, les violences sont continues : des actes de torture sont régulièrement signalés et des armes chimiques sont utilisées contre la population civile [4]. Cependant, ce n’est pas la première fois qu’un État membre appelle à faciliter les renvois vers la Syrie. Le Danemark (2022) ou Chypre (2023), entre autres, demandent à l’Union européenne de classer certaines régions de la Syrie comme « sûres » afin de pouvoir y expulser les exilé·e·s syrien·ne·s de son territoire [5]. Le nouveau Pacte sur l’asile et la migration de l’UE, qui entrera en vigueur en 2026, pourrait également faciliter les expulsions vers la Syrie. Le règlement 2024/1348 sur les procédures d’asile, adopté dans le cadre de ce Pacte, prévoit que des pays tiers puissent être considérés comme « pays d’origine sûrs », même s’il existe des exceptions pour certaines zones de leur territoire ou pour des catégories spécifiques de personnes. Ce qu’a réfuté la Cour de justice de l’UE dans un arrêt du 4 octobre 2024 [6], considérant qu’un pays d’origine « sûr » doit l’être sur l’ensemble de son territoire.
Turquie
- Le Monde, « Turquie, la machine à expulsion financée par l’UE », le 11 octobre 2024
- El País, « Refugiados encerrados como animales y deportados como criminales, con dinero de la UE », le 11 octobre 2024
Une enquête coordonnée par Lighthouse Reports a mis en lumière les conditions auxquelles les personnes exilées font face en Turquie depuis l’arrangement entre l’UE et la Turquie de 2016. mettant en lumière un système attentatoire aux droits, connu de l’Union européenne. Le gouvernement turc, avec le soutien financier de l’UE, a développé un vaste réseau de camps de détention et d’expulsion. Ces structures sont le théâtre de violences systématiques : les témoignages recueillis par Lighthouse Reports évoquent des tortures et traitements inhumains dans ces camps. Par ailleurs, la Turquie procède à des renvois dangereux vers des pays comme l’Afghanistan et la Syrie. Ce pays, ayant reçu 11,5 milliards d’euros depuis 2016, agit comme un garde-frontières qui freine les exilé·e·s aux frontières de l’Europe. Depuis cet arrangement, plus de deux millions d’exilé·e·s ont été arrêté·e·s, et les contrôles, renforcés par des technologies financées par l’UE, se sont intensifiés.
L’externalisation des politiques migratoires vers des pays dits tiers, comme la Turquie, permet à l’UE de se défausser de sa responsabilité en matière d’accueil. L’UE continue de financer la Turquie pour qu’elle joue le rôle de gardienne des frontières européennes, tout en étant pleinement consciente des violations des droits que subissent les exilé·e·s dans ce pays, y compris dénoncées par la Cour européenne des droits de l’Homme [7]. Ce détournement du regard de l’UE s’explique par sa dépendance envers la Turquie en tant que partenaire essentiel pour la gestion des mouvements migratoires, compte tenu de sa position géographique stratégique.
Croatie
- The Guardian, « Croatian police accused of burning asylum seekers’ phones and passports », le 10 octobre 2024
Un rapport récent de l’organisation No Name Kitchen (NNK) dénonce des violences systématiques lors des refoulements effectués par les garde-frontières croates à la frontière avec la Bosnie. Le rapport compile des témoignages de personnes exilées refoulées qui rapportent avoir subi des humiliations, des violences physiques et sexuelles, ainsi que des confiscations de leurs effets personnels, lesquels étaient ensuite brûlés par les garde-frontières. Les investigations menées par NNK identifient huit sites où la police croate incinérerait systématiquement des piles d’objets appartenant aux exilé·e·s, illustrant le caractère organisé de ces destructions. Ces incinérations viseraient à empêcher ces personnes de régulariser leur situation dans l’Union européenne, en les privant de leurs documents d’identité et autres pièces nécessaires au dépôt d’une demande d’asile, mais aussi à éliminer des preuves de violences, par la destruction de leurs téléphones portables susceptibles de contenir des enregistrements de ces agressions.
Depuis des années, les garde-frontières croates exercent des violences systématiques contre les personnes exilées tentant de rejoindre l’Union européenne par la route des Balkans, avec la complicité tacite de l’UE. En effet, la Croatie se voit récompensée par l’UE pour ses actions à travers des fonds pour bloquer les mouvements migratoires (ayant reçu 108 millions d’euros au titre du Fonds FAMI de l’UE et 46 millions d’euros sous forme d’aides d’urgence pour la gestion de l’immigration et des frontières depuis 2017 [8]), mais aussi à travers sa récente adhésion à l’espace Schengen [9].
Espagne
- InfoMigrants, « Spain asks Frontex to patrol African waters to curb migration », le 10 novembre 2024
L’Espagne a demandé à l’agence européenne des garde-frontières et garde-côtes Frontex, de solliciter l’autorisation des nations d’Afrique de l’Ouest pour patrouiller dans leurs eaux territoriales. Les autorités espagnoles espèrent ainsi empêcher les exilé·e·s en provenance de pays africains de rejoindre les îles Canaries. Cette demande intervient dans un contexte d’augmentation du nombre de personnes exilées arrivées en Espagne via la route des Canaries en 2024 (+ 126 % par rapport à 2023 [10]). Ce phénomène s’explique en grande partie par la fermeture de la route méditerranéenne passant par la Tunisie, conséquence de l’externalisation des politiques ultra-sécuritaires de l’UE vers ce pays, poussant ainsi les exilé·e·s africain·e·s à chercher des voies alternatives pour atteindre l’Europe.
Cette démarche n’a rien de nouveau : on le constate à travers les nombreuses tentatives de l’UE de conclure avec les pays d’Afrique de l’Ouest (comme au Sénégal [11] et en Mauritanie [12]) des accords pour déployer des agents de Frontex sur leur territoire. Cette initiative visant à élargir l’espace géographique d’intervention de Frontex est non seulement néocolonialiste, en imposant aux pays africains des conditions favorisant avant tout les intérêts européens, mais elle est aussi dangereuse pour les droits des exilé·e·s. La présence de Frontex – bras armé de la politique migratoire européenne et auteur de violations répétées des droits des exilé·e·s [13] – sur le territoire africain augmente le risque de violences subies par les personnes migrantes dans des pays où les mécanismes de protection sont souvent plus faibles qu’au sein de l’UE.
France
- Le Monde, « Bruno Retailleau souhaite prolonger la durée en centre de rétention administrative jusqu’à 210 jours pour certains migrants en situation irrégulière », le 2 octobre 2024
- Le Monde, « Bruno Retailleau cible les associations d’aide aux migrants », le 3 octobre 2024
Les premières déclarations du nouveau ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau, annoncent un durcissement des politiques migratoires en France. Depuis sa prise de poste, Retailleau affiche son intention de suivre le « modèle italien », marqué par une externalisation accrue des politiques migratoires, au mépris des droits humains. : le ministre a également annoncé la création d’une unité de recherche opérationnelle franco-italienne visant à renforcer l’échange de renseignements sur le « trafic de migrants » [14] – qui vient compléter la « border force » créée sous Gérard Darmanin – une approche qui risque de criminaliser davantage les personnes exilées. Il s’est également prononcé sur les camps pour migrant·e·s, proposant de porter la durée maximale de rétention des exilé·e·s jusqu’à 210 jours, durée actuellement réservée exclusivement à des personnes impliquées dans des actes terroristes. De plus, Retailleau s’en prend aux associations qui offrent un soutien juridique et humanitaire aux exilé·e·s dans les camps, affirmant que cette mission devrait être confiée à l’Office français de l’immigration, ce qui affaiblirait directement l’accompagnement indépendant des migrant·e·s ainsi que le droit de regard de la société civile dans ces lieux de privation de liberté.
Cette réforme ne ferait qu’accentuer le caractère punitif des camps. L’allongement de la durée maximale de rétention aurait des effets délétères sur la santé et les droits des exilé·e·s, sans toutefois entraîner une augmentation significative des expulsions, puisque 81 % d’entre elles ont lieu dans les 45 premiers jours de détention [15]. Par ailleurs, limiter le rôle des associations d’aide aux migrants au sein des camps réduirait l’accès des exilé·e·s à l’assistance juridique et humanitaire à laquelle ils ont droit selon la loi française [16]. Les déclarations de Retailleau surviennent après le meurtre d’une étudiante, le 21 septembre dernier, par un ressortissant marocain sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Ces déclarations sont une récupération politique et une instrumentalisation de cet événement : le ministre de l’Intérieur tente d’établir un lien non-avéré entre criminalité et immigration pour légitimer son agenda anti-migration et justifier une prétendue nécessité de durcir les conditions dans les camps pour migrant·e·s.
Italie/Albanie
- El País, « Una burbuja italiana en Albania donde los migrantes se hacen invisibles », le 17 octobre 2024
- InfoMigrants, « Accord Italie-Albanie : la justice désavoue Giorgia Meloni et ordonne le transfert des 12 migrants en Italie », le 21 octobre 2024
Le dimanche 13 octobre a eu lieu le premier transfert de personnes exilées depuis l’Italie vers l’Albanie dans le cadre du protocole d’entente conclu en 2023 entre Tirana et Rome pour externaliser les procédures de rétention des personnes exilées, y compris en quête de protection. Un navire de la marine italienne, en direction de l’Albanie, a embarqué 16 personnes exilées interceptées dans la zone de recherche et sauvetage italienne (eaux internationales). Celles-ci ont ensuite été transférées dans des camps financés et placés sous la juridiction de l’Italie. Cependant, ces personnes n’y sont restées que trois jours : le tribunal de Rome a ordonné leur renvoi en Italie le 18 octobre, constatant que leurs États d’origine ne pouvaient être considérés comme « pays sûrs ». Selon les propres règles de l’Italie pour ce dispositif, seuls les hommes adultes qui ne sont pas considérés comme vulnérables et qui proviennent de pays désignés comme sûrs peuvent être envoyés dans ces camps en Albanie. Le tribunal s’est appuyé sur la récente décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 4 octobre 2024, qui stipule qu’un pays ne peut être partiellement qualifié de sûr [17]. L’Égypte et le Bangladesh, pays d’origine des 16 exilés transférés en Albanie, sont en effet considérés comme « partiellement sûrs » par l’Italie, qui reconnaît les risques auxquels certaines catégories de personnes y sont exposées [18].
Bien que la décision du tribunal de Rome constitue une entrave au protocole dit Italie/Albanie, elle n’en marque pas la fin définitive. Le gouvernement italien a annoncé son intention de faire appel de cette décision et a publié un décret-loi visant à renforcer le cadre juridique de la liste des « pays d’origine dits sûrs », dans une tentative de limiter le pouvoir discrétionnaire des juges [19]. Cet arrangement s’inscrit dans la coopération en matière migratoire que l’Albanie et l’Union européenne entretiennent depuis des années. En mettant des entraves à la migration dirigée vers l’UE, l’Albanie, candidate à l’adhésion depuis 2014, témoigne de sa volonté de renforcer ses relations avec l’Union, espérant ainsi accélérer son processus d’adhésion [20].
Pologne
- El País, « Donald Tusk planea suspender el derecho al asilo en Polonia », le 12 octobre 2024
Le Premier ministre polonais Donald Tusk a annoncé le 12 octobre une nouvelle stratégie migratoire pour la période 2025-2030. Cette initiative prévoit la suspension temporaire du droit d’asile dans le but déclaré de « récupérer au 100% le contrôle de qui entre en Pologne » et de « garantir la sécurité » dans le pays. Le Premier ministre a également affirmé qu’ « il n’y a pas de politique plus humaine que protéger efficacement cette frontière ». Tusk veut ainsi transmettre le message que le renforcement de la frontière avec la Biélorussie sauverait la vie de personnes exilées en les dissuadant de tenter une traversée vers la Pologne. De plus, le gouvernement polonais instrumentalise la peur du voisin russe, une crainte persistante en Europe de l’Est depuis le début de la guerre en Ukraine. Il met en avant l’argument selon lequel la Biélorussie et la Russie « utilisent l’immigration pour déstabiliser les frontières de l’UE » afin de justifier cette politique.
Amnesty International dénonce l’instrumentalisation d’une prétendue « situation d’urgence » pour justifier l’adoption de cette mesure, qui menace le droit d’asile et les droits des personnes migrantes en Pologne [21]. La Pologne avait adopté une politique d’accueil bienveillante au début de la guerre en 2022, ouvrant ses portes sans difficulté à près d’un million d’exilé·e·s ukrainien·ne·s fuyant le conflit [22]. Les justifications que le gouvernement polonais présente ne font que renforcer la stigmatisation des exilé·e·s, perçu·e·s comme de potentielles menaces à la sécurité publique. Elles contribuent aussi à nier la responsabilité de l’État polonais dans les décès qui surviennent à la frontière avec la Biélorussie, conséquence de la sécurisation de ses frontières [23]. Cette rhétorique, qui justifie le durcissement des politiques migratoires supposé dissuader les exilé·e·s par une prétendue intention de sauver des vies, n’est par ailleurs ni nouvelle ni spécifique à la Pologne.
Commission européenne
- Le Monde, « La Commission européenne annonce une nouvelle loi favorisant les expulsions des personnes en situation irrégulière », le 15 octobre 2024
La Commission européenne prévoit de proposer une nouvelle législation visant à faciliter les expulsions des personnes dépourvues de droit de séjour dans l’UE. L’objectif affiché est de « rationaliser efficacement le processus de retour ». Il est question de créer un cadre « d’harmonisation » pour éviter que les exilé·e·s soumis·e·s à une décision de renvoi puissent « exploiter les failles » du système. La présidente de la Commission propose aussi de renforcer les relations « stratégiques » avec les pays dits tiers, à l’image de la coopération déjà mise en place avec la Libye ou la Tunisie. Dans cette logique, la Commission appelle à renforcer la coopération avec la Mauritanie pour limiter les départs vers les îles Canaries, en réponse à une hausse de ces mouvements migratoires.
La notion de « rationaliser les retours » masque la complexité des mouvements migratoires en les réduisant à une simple gestion administrative. Le danger de cette proposition réside dans la perspective de nouveaux arrangements entre l’UE et des pays dits « de transit », perpétuant ainsi l’externalisation des politiques migratoires. Comme l’ont démontré les cas de l’accord entre l’UE et la Tunisie [24], ou encore celui entre l’Italie et la Libye [25], ces pactes entraînent des violations systématiques des droits des exilé·e·s, souvent soutenues par des financements européens. Un nouvel arrangement entre l’UE et la Mauritanie, un pays régulièrement critiqué pour sa situation en matière de droits humains [26], risquerait d’aggraver la situation des personnes en quête d’un passage vers l’Europe, alors que ce pays reçoit déjà des fonds de l’UE pour limiter les départs vers les îles Canaries [27].