Évolution et structuration du réseau Migreurop.

Séance plénière (21 juin, après-midi)

Depuis le forum social européen de Florence en novembre 2002 et le colloque organisé les 25 et 26 juin 2003 au Parlement Européen à Bruxelles (« Camps d’étrangers en Europe : la démocratie en danger »), le réseau Migreurop fonctionne de manière informelle. Bien qu’une association de financement ait été mise en place, les moyens matériels et humains restent faibles. Les contributions des associations sont relativement modestes. Seuls des membres d’associations et quelques chercheurs ont participé à l’activité du réseau : établissement de la carte des camps en Europe et dans les pays méditerranéens, organisation de séminaires (FSE à Paris -novembre 2003-, les journées de Cecina -juillet 2004-), animation du site Internet et de la liste de diffusion...etc.

Les deux journées de Séville ont été mises en place afin de réfléchir à la structuration du réseau Migreurop, et de rappeler qu’il est essentiel de continuer à chercher de l’information de manière collective, sur les camps d’étrangers (en Europe, dans les pays méditerranéens...etc.) et sur les divers processus d’externalisation liés aux politiques européennes d’immigration et d’asile.


Les objectifs de Migreurop

À partir des objectifs initiaux (cf. ci-dessous) et des travaux de Migreurop, la majorité des associations et des collectifs européens présents à Séville pensent qu’il est important de mettre en commun les différents points de vue afin de construire des résistances face aux politiques (actuelles) d’immigration et d’asile en Europe.

Il est donc nécessaire de se concentrer sur le(s) but(s) de l’association, notamment à partir de ce qui a été déjà mis en place par le réseau Migreurop (mais pas uniquement).

Parmi les objectifs initiaux de Migreurop, il y a :

  L’échange d’informations sur l’enfermement, les camps et les divers processus de mises à l’écart qui est une ressource indispensable ;

  Nommer, trouver les mots pour gagner des campagnes politiques. À ce propos, il a été rappelé que la question sémantique est très importante dans l’approche de Migreurop. Elle permet notamment de se détacher du vocabulaire de “Bruxelles” (un grand nombre d’institutions européennes emploient souvent des termes teintés “d’euphémismes”) ;

  Faire connaître cette réalité afin de pouvoir ...

  ... porter des actions politiques et agir au niveau européen afin de combattre cette Europe des camps.

Ainsi le triptyque « connaître, désigner et dénoncer » pourrait être un premier “champ d’intervention” à partir duquel on chercherait à mieux décrypter tous les processus de mise à l’écart à la fois sur le territoire européen mais aussi à l’extérieur de l’Union.

Au-delà des informations diffusées par le réseau Migreurop, cette structure européenne permettra d’avoir des projets communs. Des projets communs qui permettront de passer à une phase encore plus offensive dans la dénonciation et le plaidoyer auprès des instances nationales et européennes. Le réseau doit aussi être structuré de façon à pouvoir mener des actions contentieuses devant les juridictions nationales et européennes.

Enfin certaines associations ont rappelé très clairement l’importance de dire que nous sommes contre tout type de camps (que ce soit en Allemagne, en Afrique ou ailleurs... etc.).

Associations, collectifs et chercheurs

Dès sa création, Migreurop a cherché à associer des militants et des chercheurs de l’ensemble des pays européens. Depuis, cette collaboration (plus ou moins sporadique) s’est étendue aux pays méditerranéens. La présence d’associations et de chercheurs installés dans des pays d’émigration est en effet importante. Ainsi de par la diversité des intervenants, il a été dit que la structuration du réseau doit être relativement flexible, agile et utile aux fins de la réflexion et des objectifs fondateurs de Migreurop. La présence d’associations et de personnalités diverses au sein du réseau doit nous rappeler cette réalité qui semble moins prise en compte par d’autres réseaux. « Il faut un réseau qui créée une vraie stimulation » précise un membre d’une organisation espagnole.

L’association entre militants et chercheurs au sein de Migreurop “offre” ainsi un (nouveau) cadre de réflexion où il est possible d’une part de disposer d’analyses (avec l’optique de prendre du recul), et d’autre part d’avoir un échange permanent entre les membres du réseau.

Ainsi comme l’ont proposé plusieurs personnes, le réseau pourrait être composé de plusieurs collèges (ou de niveaux différents) :

  un collège d’associations fondatrices : Anafé, Apdha, Arci, Cimade, Gisti...etc.

  un collège d’associations adhérentes

  et un collège de chercheurs et de personnes physiques (présents à titre individuel).

Ainsi ce type d’organisation permettrait au premier collège de se réunir afin de faire avancer la structure du réseau Migreurop. Par la suite, les autres organismes, les chercheurs et les personnes (présents à titre individuel) pourraient se joindre à la dynamique du réseau.

Plusieurs associations ont dit se reconnaître dans les objectifs initiaux du réseau Migreurop. Le CCFD qui est en lien avec d’autres réseaux européens et méditerranéens, partage l’essentiel des objectifs de Migreurop. Il est par ailleurs très sensible à la question soulevée par certains participants, à savoir le vécu des migrants dans les lieux d’enfermement . Migreurop doit impérativement prendre en compte ces différents aspects.

Les financements du réseau

Même si les questions financières ne doivent pas être un frein à l’action du réseau, la structuration du réseau Migreurop suppose des moyens financiers. Lors de la séance, il a été soulevé assez rapidement et à plusieurs reprises la question de l’indépendance financière par rapport aux institutions de l’Union européenne.

Plusieurs personnes ont ainsi rappelé que si Migreurop est amené à toucher des subventions de la part de l’UE, cela ne doit pas exclure la critique des institutions de l’UE et de ses représentants. D’autres participants ont également précisé que Migreurop peut garantir son indépendance dans son mode de fonctionnement et mener un lobbying très actif auprès des instances de l’Union, tout en ayant des subventions de la part de l’Union européenne. Les premières rencontres de Migreurop ont été financées grâce aux fonds européens du groupe parlementaire des verts européens.
Même si Migreurop n’a pas vocation à devenir une association « riche », il est nécessaire que le réseau se dote de nouvelles sources de financement.


Les moyens à mettre en œuvre

Le cadre

L’établissement d’un document cadre sur les politiques européennes autour de la dynamique des camps d’étrangers est donc nécessaire. D’ici le mois d’octobre, un texte fondateur doit être mis en place afin de fixer clairement les objectifs du réseau Migreurop. Toutes les associations qui le souhaitent, peuvent faire des propositions en utilisant les moyens actuels comme les liste de diffusion (en l’absence de moyens financiers suffisants). Ces moyens semblent suffisamment démocratiques pour se sentir inclus. Dans ce contexte, plusieurs organismes espagnols ont évoqué la nécessité d’une confiance préalable entre celles et ceux qui souhaitent participer à l’activité du réseau. Le but de cette nouvelle étape est de chercher à regrouper le maximum de pays en essayant de passer à une démarche plus offensive.

Proposition d’un groupe de travail qui prépare un document afin de proposer les statuts de l’association. Rappelons que les statuts qui vont être fixés, doivent êtres conformes aux lois nationales et aux objectifs du réseau Migreurop.

La fin du mois d’octobre serait la “période butoir” pour se rencontrer à Paris afin de finaliser et signer le document cadre.

La mobilisation et la contribution de ses membres

Après deux années de fonctionnement de type informel, nous entrons dans une deuxième phase. Le travail mené par Migreurop, repose principalement sur l’implication de ses membres qui ont envie de travailler ensemble. S’impliquer dans Migreurop, c’est s’engager à donner de son temps. L’inscription au réseau est synonyme de participation : organisation de réunions (comme à Séville) et de séminaires, diffusion d’information via la liste, proposer des débats via la liste de diffusion, alimenter le site Internet... etc. Son fonctionnement est donc fondé principalement sur l’engagement et le bénévolat ; et c’est cette richesse là qui est recherchée.

Par ailleurs, le réseau doit s’appuyer sur des connaissances approfondies à partir des nombreux travaux de terrain qui sont effectués dans les pays européens. Puis il importe de transformer nos observations dans un projet politique avec des luttes au niveau européen.
Le CEAR rappelle que les organisations les plus expérimentées peuvent faire des propositions concrètes ; « les autres associations ne doivent pas se sentir lésées ; par exemple nous aurions aimé signer la plainte mais c’était trop tard quand nous l’avons su » indique un de ses membres (Fernando).

Enfin face aux dangers et aux répercussions des politiques européennes d’asile et d’immigration dans les pays tiers (notamment ceux qui sont voisins de l’Union européenne), Pateras de la vida et Chabaka proposent une nouvelle rencontre de Migreurop à Tanger en 2006.