La politique sécuritaire de l’Europe a échoué

Dernières Nouvelles d’Alsace, 13/10/2013

Olivier Clochard Chargé de recherche au CNRS et président du réseau Migreurop (*)

La politique migratoire européenne est-elle un échec ?

« Depuis 2005, avec la création de Frontex, l’agence chargée de s’occuper de la coordination de la surveillance des frontières européennes, il y a eu un renforcement des moyens. Ils ont augmenté de 19 millions d’euros en 2006 à 85 millions en 2013. Sur la même période, le nombre de morts de migrants en Méditerranée est passé de 500 par an à 2 000. Avec un tel bilan, on peut s’interroger sur cette politique sécuritaire qui oblige les migrants à prendre des routes de plus en plus dangereuses. »

Selon vous, le droit international n’est pas toujours respecté ?

« Cet été, un pétrolier colombien a sauvé une centaine de Libyens vers Malte. Ni les autorités maltaises ni les italiennes n’ont accepté que le bateau accoste. Les boat-people ont été reconduits à Tripoli. Ces décisions européennes bafouent le droit d’asile. »

Vous parlez aussi d’une attitude criminelle. C’est fort ?

« On a collecté des témoignages concernant des bateaux militaires, des garde-côtes, des pêcheurs, des navires de la marine marchande qui passent à proximité d’embarcations de migrants en détresse. Criminel ! C’est la faute, en premier lieu, aux capitaines qui ne vont pas à leurs secours. Mais la politique migratoire européenne est aussi responsable. En 2008, un bateau tunisien qui avait aidé des boat-people a été mis sous séquestre par la justice italienne pour aide à l’immigration clandestine. Le message était fort... »

Que proposez-vous ?

« L’aide au boat-people ne doit pas être criminalisée. Il serait souhaitable que les chefs d’État, lors du prochain conseil européen, aient un discours fort en ce sens. »

(*) Réseau de chercheurs et d’associations travaillant sur les problématiques migratoires.

Propos recueillis par Patrice Barrère

Pour retrouver l’article en ligne :
http://www.dna.fr/politique/2013/10/13/la-politique-securitaire-de-l-europe-a-echoue