Revue de presse septembre 2025

 Libye

Dans la nuit du 25 au 26 septembre, le navire civil Sea-Watch 5 a essuyé des tirs de la part des dits « garde-côtes » libyens, alors qu’il venait de secourir 66 personnes en Méditerranée. Sea-Watch rappelle que le patrouilleur utilisé par les forces Libyennes leur a été fourni par l’Union européenne, en particulier via l’Italie, dans le cadre du protocole d’accord sur la migration conclu en 2017entre l’Italie et la Libye, renouvelé depuis. L’organisation dénonce une complicité européenne dans ces violences, alors que la Libye n’a aucune juridiction en eaux internationales.

Cette nouvelle attaque survient un mois à peine après que l’Ocean Viking, navire civil de recherche et de sauvetage en mer de l’ONG SOS Méditerranée, a été visé par les tirs d’un patrouiller libyen. Ces attaques répétées marquent une escalade dans la violence exercée contre les acteur·ice·s civil·e·s en mer. Elles sont les conséquences directes des politiques européennes d’externalisation, qui délèguent aux autorités libyennes le contrôle des mouvements migratoires. En contribuant à former et équiper [1] lesdits « garde-côtes » libyens, sans jamais officiellement dénoncer leurs actions et exactions à l’encontre des personnes exilées, l’Union se rend complice de violations graves du droit international, y compris de l’usage disproportionné de la force contre des acteur·ice·s civil·e·s. Ces pratiques créent une situation de criminalisation du sauvetage en mer, entravent les mobilités et exposent les personnes en migration à des risques accrus : refoulements, violences, détentions arbitraires. À travers cette politique, l’Europe privilégie la fermeture de ses frontières au détriment de la protection des vies humaines, et contribue à l’impunité des milices opérant en Méditerranée centrale.

 Sénégal

Les autorités sénégalaises, par l’intermédiaire du Comité interministériel de lutte contre la migration irrégulière (CILMI), annoncent avoir intercepté 1 946 personnes en migration entre janvier et mars 2025. Parmi elles, près de la moitié sont des ressortissant·e·s étranger·ère·s utilisant le Sénégal comme point de départ de leur parcours migratoire. Les opérations ont conduit à l’arrestation de 74 convoyeurs présumés et à la saisie de 32 pirogues. Cette stratégie répressive, qui s’accompagne d’un discours officiel sur la prévention des risques encourus sur les routes de l’exil, s’inscrit dans un contexte de renforcement du contrôle maritime et des frontières.

Derrière la rhétorique de la « protection » et de la « prévention », ces mesures visent avant tout à empêcher les départs vers l’Europe, au prix d’arrestations massives et de la criminalisation des mobilités. Elles répondent directement aux pressions et aux partenariats internationaux, notamment avec l’Union européenne et ses États membres, qui financent la surveillance des côtes sénégalaises et conditionnent leurs aides à une coopération renforcée contre la migration dite “irrégulière”. Cette politique de verrouillage accroît les risques de violations des droits et pousse les personnes en exil à emprunter des routes plus dangereuses.

 Liban

Le 11 septembre 2025, près de 300 Syrien·ne·s ont été renvoyé·e·s du Liban vers Homs, Hama et Idleb, dans le cadre d’une opération de retours dits « volontaires » mise en place par le concours du HCR, de l’OIM et de la Sûreté générale libanaise. Les autorités libanaises, sous pression économique et sociale, promeuvent ces renvois en offrant une aide financière et en levant temporairement les amendes pour séjour administratif irrégulier. Ce dispositif s’inscrit dans un programme plus large, depuis le début de l’année près de 238 000 Syrien·ne·s auraient déjà été renvoyé·e·s en Syrie.

Derrière la rhétorique humanitaire et l’étiquette « volontaire », ces renvois se déroulent dans un contexte marqué par des violations répétées de droits, des pressions croissantes sur les Syrien·ne·s au Liban : stigmatisation, violences antisyriennes, absence d’accès aux droits fondamentaux et aux soins de santé [2]. Dans ces conditions, beaucoup n’ont d’autre option que de repartir, même vers un pays qui reste profondément instable et dangereux. Malgré le renversement du régime de Bachar al-Assaden décembre 2024, la Syrie continue d’être marquée par des violations massives des droits de l’Homme, une économie en ruines et des zones de guerre toujours actives [3]. En organisant et en facilitant ces renvois, les autorités libanaises et les agences internationales fragilisent le droit d’asile et exposent des milliers de personnes à des risques graves de persécution, de violences et de déplacements forcés.

 Allemagne

Le ministre de l’Intérieur allemand, Alexander Dobrindt, a annoncé que l’Allemagne allait renouveler,pour la période allant du 16 septembre 2025 au 15 mars 2026, les contrôles aux frontières intérieures de l’espace Schengen. Il a déclaré que l’Allemagne continuera de maintenir de tels contrôles,en faisant valoir que « l’immigration irrégulière constitue une grave menace pour l’ordre public et la sécurité » [4]et ce, tant que le système de protection des frontières extérieures de l’Union européenne ne sera pas pleinement opérationnel.

Ce rétablissement était prévisible, il s’inscrit dans le tournant restrictif engagé par le chancelier Merz depuis sa prise de fonction en mai 2025. Il s’agit en vérité d’une pratique quasi constante et décomplexée de certains États membres de l’Union européenne, dont l’Autriche, la Pologne ou la France [5]. En principe, le code frontière Schengen (CFS) conditionne le rétablissement des contrôles aux frontières intérieures à une durée maximale de 6 mois, sauf à ce que l’État membre justifie d’une menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure. Auquel cas,depuis la réforme du CFS en mai 2024, les contrôles peuvent être réintroduits pour une durée n’excédant pas trois années consécutives. En pratique, les réintroductions de contrôles aux frontières intérieures,sont justifiées par une utilisation dévoyée du CFS. Derrière la logique sécuritaire de ces contrôles, souvent réalisés « au faciès », l’objectif des autorités est d’entraver la mobilité et de refouler massivement les personnes en migration pour les empêcher notamment de déposer une demande d’asile en Allemagne.

 Belgique

Huit agents de Frontex ont pris leurs fonctions début septembre 2025 à l’aéroport de Bruxelles-Zaventem, une première en Belgique. Ce déploiement s’appuie sur la loi dite « Frontex », adoptée le 16 mai 2024, et sur un arrêté royal d’avril 2025 qui ouvre la voie à une présence permanente de l’agence européenne sur le territoire belge, notamment en gare et à l’aéroport, pour procéder à des contrôles, arrestations et expulsions. Jusqu’à 100 agents pourront à terme être déployés et participer aux procédures d’expulsion. Présentée comme un simple renfort « technique » placé sous l’autorité des policiers belges, cette installation vise explicitement à augmenter le nombre d’expulsions.

Ce déploiement pose problème en matière d’accès aux droits, parce qu’il n’apporte aucune garantie effective contre les violences et traitements inhumains ou dégradants qui pourrait résulter de la présence de l’agence européenne, laquelle est juridiquement intouchable [6]. Dans un contexte où Frontex est déjà mise en cause pour complicité ou complaisance dans des refoulements en mer Égée ou aux frontières balkaniques [7], cette implantation en Belgique marque une nouvelle étape de la banalisation des pratiques répressives contre les personnes en exil, avec la complicité active des institutions européennes et nationales.

 Espagne

Le 24 août dernier, une pirogue partie du Sénégal avec à son bord environ 300 personnes a été secourue au large de Gran Canaria après 11 jours de traversée. À bord, les survivant·e·s ont rapporté des violences extrêmes : des dizaines de passager·e·s auraient été frappé·e·s, torturé·e·s et plus de 50 personnes auraient été jetées par-dessus bord. La police espagnole a interpelé 19 personnes, lesquelles ont été condamnées pour homicides et aide à l’entrée au séjour irrégulier.

Derrière la mise en avant des arrestations, ce drame révèle surtout la violence structurelle des politiques migratoires européennes. La politique de fermeture des frontières entrave la mobilité des personnes en migration, lesquelles faute de pouvoir obtenir un visa afin de voyager en toute sécurité,sont contraintes d’emprunter la route atlantique, considérée comme l’une des plus dangereuses au monde [8]. En sus, la multiplication des interceptions financées par l’Union sur la façade atlantique entraîne un allongement des routes,alors que les embarcations sont déjà surchargées et dérivent souvent pendant des jours, laissant ceux qui s’y trouvent sans eau ni nourriture. En criminalisant uniquement ceux qu’elle identifie comme des « passeurs », la justice espagnole détourne le regard et participe à la stigmatisation des personnes exilées, qui souvent se retrouvent désignées comme responsables de la navigation par nécessité ou sous la menace, alors qu’elles sont elles-mêmes victimes du système qui les pousse à risquer leur vie en mer.

 France

Début septembre, lors d’une visioconférence organisée par France Travail, un ex-officier de liaison français de Frontex a présenté le métier de garde-frontières comme une opportunité pour les « jeunes hommes » attirés par « la chasse ». L’agence cherche à recruter 500 nouveaux agents d’ici janvier 2026, en abaissant le niveau d’étude requis du bac+3 au baccalauréat et en offrant un salaire attractif. Officiellement, Frontex met en avant la vérification de documents et la gestion administrative des mouvements migratoires, mais les propos tenus révèlent une vision militarisée et violente du métier, centrée sur l’interpellation et la traque des personnes en migration.

Cette communication illustre le décalage entre l’image policée que Frontex veut donner et la réalité de ses pratiques, à savoir une agence dotée d’un budget colossal, qui recrute en masse pour renforcer une politique européenne d’externalisation et de refoulement, attentatoire aux droits fondamentaux des personnes en migration. L’usage du mot « chasse » en dit long sur Frontex : il traduit une conception déshumanisante des exilé·e·s considéré·e·s comme des cibles à traquer et participe de leur stigmatisation en tant que « criminel·le·s ». Cette nouvelle révélation s’inscrit dans un contexte où l’agence européenne est déjà éclaboussée par des accusations de complicité de crimes contre l’Humanité [9]pour avoir couvert ouparticipé à des refoulements violents menés en mer Égée ou aux frontières de la route des Balkans. Sous couvert de renforcer la sécurité des frontières, l’agence européenne, consolide un appareil répressif qui banalise la violence, fragilise le droit d’asile et alimente la criminalisation des migrations : « si France travail a condamné les propos tenus lors de cette visioconférence, l’agence, elle, n’a rien désavoué » [10].

 Grèce

La Grèce durcit encore sa politique migratoire, la loi votée le 3 septembre 2025 introduit des peines d’emprisonnement et des amendes pour les personnes déboutées de l’asile qui se maintiennent sur le territoire et supprime le mécanisme de régularisation pour les personnes dépourvues de documents en règle justifiant d’une résidence de sept ans sur le territoire national. Les demandeur·se·s qui verront leurs demandes rejetées disposent désormais d’un délai de « départ volontaire » de 14 jours, contre 25 auparavant, pour quitter le territoire, faute de quoi ils encourent jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 10 000 euros d’amende pour « entrée irrégulière » sur le territoire. La loi prévoit également que les personnes expulsées pourront être contraintes de porter un bracelet électronique jusqu’à leur sortie du territoire, et la durée du placement en détention administrative est portée de 18 à 24 mois, comme par anticipation du Règlement retour pourtant toujours en discussion, mais surtout, en violation de l’actuelle Directive retour.

En assimilant le séjour irrégulier à une infraction pénale, la Grèce choisit de criminaliser l’exil et participe une fois encore à la stigmatisation des personnes en migration, en violation de la jurisprudence de la Cour de justice, laquelle a statué que l’irrégularité du séjour ne constitue pas un motif suffisant pour entraîner une sanction pénale. L’accélération des renvois forcés, prive les exilé·e·s de leur droit à un recours effectif et augmente le risque qu’il·elle·s soient expulsé·e·s vers des pays où leur vie et leurs droits sont menacés, en violation de la Convention européenne des droits de l’Homme. La mise en œuvre de cette loi reste largement dépendante de l’obtention des laissez-passer consulaires, ce qui risque de généraliser la détention des personnes en migration au mépris de leurs droits fondamentaux. La suppression des voies de régularisation, condamne des milliers de personnes vivant en Grèce depuis plusieurs années à une précarité et une insécurité juridique permanentes, en méconnaissance de leurs droits les plus fondamentaux.

La logique dissuasive de cette loi n’empêchera pas les traversées de la Méditerranée, mais elle poussera les exilé·e·s vers des routes plus longues et périlleuses, accroissant ainsi le nombre de naufrages, et plus généralement les risques qui pèsent sur eux·elles.

 Italie

Le 5 septembre 2025, l’Italie a immobilisé pour 20 jours l’aéronef d’observation « Colibri 2 » de l’ONG Pilotes Volontaires et condamné l’organisation au paiement d’une amende de 100 000 euros. L’appareil est utilisé pour repérer en mer les embarcations d’exilé·e·s en détresse en Méditerranée centrale et notamment entre l’Italie, la Tunisie et la Libye. Selon l’association, la saisie est rendue possible en application du décret-loi Flussi, qui impose aux humanitaires volants de signaler toute embarcation repérée aux centres de coordination et aux autorités des zones adjacentes, y compris aux ’garde-côtes’ libyens et tunisiens.

En criminalisant les acteurs civils de recherche et de sauvetage en mer et en prononçant à leur encontre des sanctions financières largement disproportionnées, l’Italie affiche la volonté d’entraver leur action, voire même à terme de les faire disparaître, au risque d’engendrer davantage de naufrages, les patrouilles navales étatiques en mer Méditerranée ayant été retirées en 2019 au profit de la surveillance aérienne. Cette immobilisation s’inscrit dans une tendance répressive inquiétante des autorités italiennes [11], et ce malgré une décision de la Cour constitutionnelle italienne [12] jugeant en ce sens que toute décision fondée sur des normes punitives et discriminatoires, contournant le droit maritime international, devait être considérée comme illégale et illégitime.

 Pays-Bas

Le 25 septembre 2025, les Pays-Bas et l’Ouganda ont signé une lettre d’intention en marge de l’Assemblée générale de l’ONU, visant à créer un « centre de retour » pour les demandeur·euse·s d’asile débouté·e·s. Ce projet pilote prévoit d’envoyer en Ouganda des personnes qui ne peuvent pas être renvoyées directement vers leur pays d’origine, notamment si celui-ci est voisin de l’Ouganda. Présenté comme une « solution innovante » par le gouvernement néerlandais, ce plan s’inscrit dans la lignée des politiques d’externalisation déjà expérimentées ailleurs en Europe. Il rappelle notamment le deal britannique d’expulsion vers le Rwanda, jugé illégal en 2023 par la Cour suprême du Royaume-Uni [13]. Ce projet, annoncé dans un climat politique marqué par la montée de l’extrême droite et des manifestations anti-migrants aux Pays-Bas, alimente de vives critiques, particulièrement au regard du bilan contesté de l’Ouganda en matière de droits humains [14].

Ce projet affiche l’ambition néerlandaise d’expulser les personnes exilées, non plus seulement de ses frontières, mais du continent européen. En envoyant des personnes déboutées de l’asile dans un pays tiers comme l’Ouganda, les États européens délèguent aux États du Sud Global la gestion de l’accueil (et potentiellement de l’expulsion) des personnes en migration, au risque d’engendrer de graves violations des droits et de déstabiliser les pays du Sud, qui accueillent déjà nombre d’exilé·e·s. Derrière le discours officiel qui insiste sur des « centres conformes aux droits humains », ce type d’arrangement expose en réalité les personnes concernées à un risque accru de persécutions, de violences et de violations de leurs droits fondamentaux. En outre, ces accords informels créent une zone d’opacité et de non-droit : éloigné·e·s du regard de l’opinion publique européenne et des institutions de contrôle, les exilé·e·s sont plus vulnérables aux abus et aux traitements inhumains ou dégradants. Cette initiative néerlandaise, qui survient après l’échec du modèle britannique au Rwanda, poursuit en outre une tendance inquiétante : loin de tirer les leçons des violations constatées, certains États européens persistent à institutionnaliser l’externalisation, transformant les pays tiers en zones de rétention et fragilisant toujours davantage l’accueil des personnes exilées.

  Royaume-Uni

Depuis la mi-septembre, les premiers vols d’expulsion vers la France ont commencé en application du nouvel accord réciproque dit « one in, one-out » conclu le 10 juillet 2025. Pour rappel, Paris s’est engagé à « reprendre » toute personne ayant traversé la Manche et n’ayant pas demandé l’asile ou dont la demande d’asile a été jugée irrecevable au Royaume-Uni, en échange de l’admission sur le territoire britannique par voies dites régulières d’un·e exilé·e.

Ces expulsions privent les demandeur·se·s d’asile de leur droit à un examen individualisé, la seule circonstance qu’ils aient traversé la Manche étant suffisante pour que leur demande d’asile soit jugée irrecevable au Royaume-Uni. Les candidat·e·s arbitrairement admis·es au Royaume-Uni se voient initialement accorder un titre de séjour temporaire d’une durée de trois mois sans autorisation de travail, mais il·elle·s n’ont aucune garantie quant à l’obtention a posteriori d’un droit au séjour, ni même quant à leur expulsion à défaut de l’obtention d’un droit au séjour. En France, les personnes réadmises n’ont guère de perspectives :elles pourront déposer leur demande d’asile à condition de ne pas l’avoir déjà fait dans un autre pays, au risque d’être placées en procédure Dublin. A défaut, elles seront placées en centre de rétention en vue de leur expulsion du territoire.

Le gouvernement britannique a suspendu le droit au regroupement familial pour les réfugié·e·s et bénéficiaires de la « protection humanitaire ». Cette procédure permet aux bénéficiaires d’une protection internationale de solliciter un titre de séjour pour leur conjoint·e et leurs enfants, sans avoir à satisfaire aux conditions de ressources et de connaissance de la langue anglaise qui sont exigées dans le cadre de la procédure de visa familial. Le gouvernement fait savoir que cette mesure est temporaire, le temps d’élaborer une réforme visant à durcir les conditions de la procédure de regroupement familial.

Avec la suspension du regroupement familial, les familles,qui ne peuvent pas obtenir de visa afin de se déplacer en sécurité, sont contraintes d’emprunter des routes, notamment maritimes,où leurs vies sont mises en danger. Cette suspension entraîne donc une séparation forcée des familles, en méconnaissance du droit à la vie familiale tel qu’il est protégé notamment par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme. Cette mesure s’inscrit dans une logique globale de durcissement de la politique migratoire au Royaume‑Uni et au-delà en Europe, l’Allemagne ayant déjà suspendu la procédure de réunification pour les personnes bénéficiaires de la protection subsidiaire [15].

 Frontex

Selon une note interne du Conseil de l’Union européenne, les États membres débattront prochainement d’un élargissement du mandat de Frontex. L’objectif serait de permettre à l’agence européenne non seulement de renforcer sa coopération avec les pays tiers, mais aussi d’organiser des expulsions forcées entre États tiers, une option déjà rejetée par deux fois (en 2016 et 2019) par le Parlement européen, colégislateur. Certains gouvernements proposent même de confier à Frontex un rôle au sein des plateformes d’expulsion installées dans des pays tiers, prévues dans le règlement retours proposé par la Commission européenne en mars 2025. Cette dernière a également proposé de tripler le personnel de Frontex d’ici 2027.

Cette note illustre la volonté de l’Union européenne de renforcer une fois encore l’agence européenne Frontex en dépit du bon sens, de pousser toujours plus loin l’externalisation du contrôle migratoire et d’en faire peser la charge sur les pays du Sud, au prix d’atteintes aux droits fondamentaux des personnes exilées. En outre,la mise en place de plateformes d’expulsion hors UE, combinée à un triplement annoncé des effectifs de Frontex, consacre une logique de militarisation et de délocalisation des frontières européennes. Cette orientation s’inscrit dans la continuité du Pacte européen sur la migration et l’asile,adopté en 2024, et des pratiques déjà contestées de l’agence. En donnant encore plus de pouvoirs à Frontex, l’UE légitime une structure déjà marquée par les abus, et renforce une politique qui privilégie le contrôle et l’expulsion au détriment de l’accueil.