Dérives de l’opération Frontex : Lancement de la campagne FRONTEXIT à Nouakchott

Le Calame (Mauritanie), 27/03/2013

La campagne inter-associative FRONTEXIT a été lancée, le 20 mars, à Bruxelles et à Nouakchott, et le 28 mars, à Tunis, lors d’un atelier du Forum Social Mondial (FSM). À l’initiative du réseau MIGREUROP, des associations du Nord et du Sud de la Méditerranée se mobilisent pour dénoncer la politique de FRONTEX, l’agence européenne chargée du contrôle de l’immigration.

A Nouakchott, plusieurs journalistes de la presse mauritanienne ont été conviés, par les organisations de la société civile, à une conférence de presse marquant le lancement officiel de cette manifestation, afin de porter, à la connaissance des professionnels de la communication, les objectifs assignés à ladite campagne. Une série de rencontres ont été menées par ces acteurs de la société civile, avec les parlementaires et autres responsables de partis politiques. Egalement invités, les migrants vivants à Nouakchott ont pu témoigner.

Le représentant de l’Association Mauritanienne des Droits de l’Homme (AMDH) s’est fait cheville ouvrière du combat mené contre les violations des droits humains. Daouda Sarr a évoqué largement la problématique de la migration en Mauritanie et des enjeux de la lutte menée par les pays européens, avant de s’appesantir sur les nombreuses questions qui se posent quant au fonctionnement, à la transparence et au respect des droits humains par FRONTEX.

Il a fait part, à l’assistance, de l’objectif central de FRONTEXIT : informer un large public et dénoncer, auprès des représentants politiques directement impliqués, les dérives engendrées par les opérations de FRONTEX, en termes de droits humains. Plus concrètement et à travers des actions d’investigation, de contentieux, de sensibilisation et d’interpellation politique, les organisations de la société civile demandent :

  • la transparence sur les mandats, les responsabilités et les actions de FRONTEX ;
  • la suspension des activités de l’agence identifiées comme contraires aux droits humains ;
  • l’annulation du règlement fondateur de FRONTEX, s’il est démontré que le mandat de l’agence est incompatible avec le respect des droits fondamentaux.

La campagne FRONTEXIT vise, notamment, à rassembler des informations sur le fonctionnement de l’agence FRONTEX, ses activités et les conséquences de ses activités sur les migrants. Ses membres rencontrent des acteurs-clés et questionnent, par le biais de courriers, FRONTEX, les institutions européennes et les Etats-membres de l’Union européenne. Ils questionnent en particulier l’agence sur des accidents où FRONTEX a joué un rôle, afin d’identifier les responsables. Plusieurs missions, institutionnelles et de terrain, sont prévues. La première aura lieu en 2013, à la frontière gréco-turque. Des volontaires sont également envoyés sur le terrain, par le réseau MIGREUROP, afin de mieux comprendre l’impact politique de FRONTEX dans les Etats concernés, qu’ils soient ou non membres de l’UE.

Dispositif complexe

« L’idée est partie d’un constat », fait remarquer El Hadj Amadou M’Bow, secrétaire général de l’AMDH, dans un entretien accordé à RIMWEB, « de nombreuses personnes perdent la vie en tentant de rejoindre l’Europe qui a érigé, ces dernières années, de nombreuses barrières. Nous pensons que les responsabilités sont partagées, entre les pays de transit, d’origine et d’accueil ».

De fait, l’Union européenne investit des millions d’euros dans un dispositif quasi-militaire pour surveiller ses frontières extérieures : FRONTEX ; qui pose de sérieux problèmes du point de vue des droits de l’Homme. A défaut de la dissolution de cette agence, une revendication qui relève assez de l’utopie, les protestataires réclament une amélioration de l’existant, en terme de responsabilité. Leur campagne se déroulera durant toute l’année et débordera un peu sur 2014. Plusieurs activités de plaidoyer sont au programme. Des professionnels de la communication seront mis à contribution, afin de relayer l’information vers les coins les plus reculés des Etats. M’Bow espère que ladite campagne contribuera à éclairer les opinions publiques nationales et internationale, les décideurs, les acteurs de la société civile et les politiques, sur la situation de FRONTEX. Il souhaite que « la presse mauritanienne participe, de façon très dynamique, à cette mobilisation et joue un rôle d’éveil des populations, sur les enjeux de la migration ».

Le choix de Nouakchott relève d’un fait anodin. Lors de la manifestation « No frontière », en juin 2008, à Varsovie (Pologne), M’Bow fut le seul africain de la délégation des acteurs de la société civile à être reçu par les responsables de FRONTEX et c’est pour honorer leur collègue que les initiateurs de la campagne ont porté leur choix sur la Mauritanie.

M’Bow Amadou fonde de grands espoirs sur cette manifestation qui devrait permettre, aux différents acteurs, de prendre conscience des dérives de l’agence FRONTEX et des méfaits de la politique migratoire de l’Union Européenne. Signalons, enfin, que FRONTEXIT réunit vingt-et-une associations, des chercheurs et des diverses personnalités de la société civile du Nord et du Sud de la Méditerranée (Belgique, Cameroun, France, Italie, Mali, Maroc, Mauritanie, organisations internationales, réseaux euro-africains).

THIAM Mamadou

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