Grèce : Il faut protéger les droits des plus vulnérables

Ce jeudi 21 septembre 2006, Amnesty International a appelé les autorités grecques à protéger pleinement les droits des personnes les plus vulnérables aux atteintes aux droits humains - telles que les femmes, les minorités, les demandeurs d’asile et les migrants.

La secrétaire générale de l’organisation, Irene Khan, était en Grèce pour y recevoir un prix de l’Association du barreau d’Athènes pour la contribution d’Amnesty International à la protection des droits humains dans le monde.

« Ce prix remis par l’Association du barreau d’Athènes illustre le lien fondamental entre l’état de droit et le respect des droits humains. C’est une reconnaissance de notre travail et du pouvoir des individus quand ils s’organisent pour défendre les valeurs et les principes relatifs aux droits humains », a déclaré Irene Khan.

La secrétaire générale a rencontré le ministre de l’Intérieur et des représentants du ministère de l’Ordre public, à qui elle a présenté les préoccupations d’Amnesty International concernant la situation des droits humains en Grèce.

L’organisation dispose notamment d’informations sur les conditions effroyables dans lesquelles sont détenus certains migrants et demandeurs d’asile, conditions qui s’apparentent à des traitements cruels et inhumains.

Irene Khan a appelé les autorités à mettre en place des procédures efficaces permettant à tous ceux qui se présentent à la frontière de demander l’asile et de bénéficier d’un réexamen indépendant de leur dossier en cas de rejet de leur demande, ainsi que de services d’aide juridique.

Amnesty International et l’Association du barreau d’Athènes ont conjointement engagé le gouvernement à fournir à ces personnes une aide juridique pour leurs démarches administratives.

Lors de sa rencontre avec le ministère de l’Ordre public, Irene Khan a demandé qu’une délégation d’Amnesty International soit autorisée à interroger la centaine de personnes détenue depuis deux semaines à Chania, en Crète, sans avoir pu recevoir la visite d’aucun avocat ni organisation non gouvernementale, à la suite du naufrage de leur bateau à proximité des côtes crétoises.

« Nous espérons que le secrétaire général du ministère de l’Ordre public examinera notre demande rapidement et nous permettra de rencontrer les personnes détenues à Chania avant qu’elles ne soient renvoyées », a déclaré Irene Khan.

La secrétaire générale d’Amnesty International a aussi appelé la Grèce à défendre les droits humains et à ne pas permettre qu’ils soient bafoués au nom de la sécurité : « Les autorités grecques doivent respecter l’état de droit et veiller à ne pas se rendre complices des atteintes aux droits humains commises au nom de la "guerre contre le terrorisme". »

Selon des informations fournies par le Conseil de l’Europe, la Grèce pourrait avoir manqué de précaution en autorisant des avions de la Central Intelligence Agency (CIA, Services de renseignements des États-Unis) à faire escale en Grèce, dans le cadre du programme américain de transferts secrets de détenus de pays européens vers des lieux de détention ou d’autres pays où ils pourraient être confrontés à la torture ou à d’autres violations graves des droits humains.

« Les autorités grecques doivent mettre en place des mécanismes garantissant que leurs aéroports et leur espace aérien ne soient pas utilisés pour transférer illégalement des prisonniers dans des pays où ils risquent de subir des tortures et des mauvais traitements. »

Amnesty International a aussi interpellé les autorités grecques au sujet de l’enlèvement et de la détention au secret de personnes d’origine pakistanaise après les attentats de juillet 2005 au Royaume-Uni. Ces personnes auraient été interpellées et interrogées par des agents des services de renseignements grecs à la demande des services secrets britanniques. L’organisation va suivre avec attention la procédure judiciaire engagée contre les deux agents des services de renseignements grecs inculpés dans cette affaire.

Par ailleurs, Amnesty International a appelé le Parlement grec, à l’heure où il examine un projet de loi sur la violence domestique, à adopter une loi qui accorde une place centrale à la protection des femmes, notamment en instaurant des mesures de restriction efficaces et en proposant un nombre suffisant de centres d’accueil, ainsi que des mécanismes d’aide juridique. L’arbitrage devrait être proposé aux femmes sous la forme d’un service assuré par un expert indépendant, uniquement à leur demande.

« Cette loi doit établir très clairement que la violence domestique, ainsi que les autres formes de violence contre les femmes, ne sauraient en aucun cas être tolérées », a souligné Irene Khan.

« Tous les parlementaires doivent faire la preuve de leur engagement en faveur des droits humains et montrer qu’ils ont la volonté politique de combattre la violence domestique, d’empêcher qu’elle ne se reproduise et d’œuvrer en vue de son éradication totale. »

En ce qui concerne la lutte du gouvernement contre la traite des femmes à des fins d’exploitation sexuelle, l’une des principales préoccupations est la subordination de la protection des victimes au fait qu’elles témoignent contre les auteurs de la traite.

« Les femmes victimes de la traite ne doivent pas subir une deuxième victimisation. Elles doivent être protégées, qu’elles soient prêtes ou non à témoigner. Celles qui acceptent de témoigner doivent bénéficier d’un programme efficace de protection des témoins », a précisé Irene Khan.

Amnesty International a aussi soulevé la question des violations du droit des Rom à un logement convenable, ainsi que du droit à la réintégration des personnes arbitrairement privées de leur nationalité.

« La Grèce préside actuellement le Conseil de sécurité des Nations Unies ; sa contribution à la résolution des problèmes urgents dans le monde ne sera crédible que si elle est prête à prendre des mesures efficaces pour améliorer son propre bilan en matière de droits humains », a conclu Irene Khan.

Source : Amnesty International