Mobilités Sud-Sud en Amérique centrale : des frontières différenciées entre légalité et informalité

Atlas libertés de circulation 2022

Ce mois-ci, Migreurop vous présente une nouvelle carte issue de l’« Atlas des migrations dans le monde : libertés de circulation, frontières, inégalités » qui propose un traitement original et éclairant des enjeux migratoires contemporains en explorant la notion de liberté de circulation.

Cet ouvrage s’intéresse aux moments historiques, aux dispositifs, aux politiques et aux moyens mis en œuvre par les États pour faciliter les migrations et les mobilités en général. Il vise à remettre en question l’idée qu’il n’y aurait pas d’alternative au durcissement des politiques migratoires, tout en invitant à (re)penser la libre circulation au-delà de l’ordre existant du droit international et à partir des « pratiques par le bas ».

En ce début de second mandat de Donald Trump à la Maison Blanche et au vu de l’intensification des expulsions d’exilé·e·s résidant aux États-Unis vers les pays centraméricains [1], Migreurop vous propose de (re)découvrir la zone de libre-circulation centraméricaine (ou CA4) et les dynamiques qui la façonnent.

En effet, depuis le 20 janvier 2025, des millions d’exilé·e·s en situation dite « irrégulière » aux États-Unis, dont près de 20% seraient d’origine centraméricaine [2], sont menacé·e·s d’expulsion par l’administration Trump. Pour mener ces expulsions, les États-Unis ont recours à la menace ou au marchandage afin de contraindre (entre autres) les pays centraméricains à reprendre leurs ressortissant·e·s [3], à financer des vols d’expulsion [4], ou encore à admettre et détenir des ressortissant·e·s d’autres États sur leur territoire [5]. En parallèle, à l’instar de l’Union Européenne, les États-Unis externalisent aussi le contrôle de leur frontière en le sous-traitant aux États centraméricains, traversés par des mouvements migratoires dirigés vers l’Amérique du Nord, en échange de programmes de coopération et de développement [6].

Les États-Unis imposent ainsi aux pays centraméricains un durcissement des politiques migratoires, dans une approche transactionnelle similaire à celle qu’emploie l’Union Européenne avec les pays dits « tiers ».

La carte « La zone de libre circulation centraméricaine » de Tony Hauck, ainsi que le texte de Delphine Prunier qui l’accompagne, nous rappellent que dès 2006, la légalisation de la mobilité entre le Salvador, le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua a été mise « au service des pouvoirs économiques et de leurs besoins en force de travail, irrégulière et donc aisément exploitable ». Ils permettent ainsi d’illustrer comment les logiques capitalistes et l’externalisation des politiques migratoires et frontalières font obstacle au développement des mobilités Sud-Sud. Dès lors, l’actualité de ces dernières semaines appelle à s’interroger sur l’avenir de cet espace de libre-circulation, et plus généralement sur l’impact des politiques migratoires de l’administration Trump sur la région centraméricaine.